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Perdonen mi francés - segunda entrega

Marie-Laure Mailles compartió este extraordinario testimonio de la escritora y novelista francesa Christiane Singer, que dictó por teléfono en los últimos días de su vida (traducción mía, versión en francés al final):


«Es desde el fondo de mi cama que les hablo.

«De lo que les quiero hablar es, sencillamente, de lo que acabo de vivir. Mi última aventura. Dos meses de una travesía vertiginosa ¡y tan desgarradora! Sobre todo, en el misterio del sufrimiento.

«Todavía me cuesta mucho hablar con sangre fría. Quiero sólo evocarlo. Porque este sufrimiento me ha consumido, me ha acepillado hasta la transparencia. Calcinado hasta la última célula. Y fue quizá gracias a ello que fui lanzada, hasta ir a parar a lo inconcebible. Hubo una noche, en particular, cuando derivé hacia un espacio desconocido. Lo que es inquietante es que cuando todo está destruido, cuando ya no hay nada de nada, pero de verdad nada, tampoco está la muerte ni el vacío, como uno lo creería; no, para nada. Se los juro. Cuando ya no hay nada de nada, sólo hay Amor. Nada más que el Amor. Todas las represas se rompen. Es el ahogamiento, la inmersión. El amor no es un sentimiento. Es la sustancia misma de la creación. Y es para dar testimonio de ello que salgo de ese estado, porque hace falta salir de uno para poder hablar. ¡Como el nadador que sale del océano, todavía estilando sus aguas! Es un poco desde este estado anfibio que me dirijo a ustedes. Uno no puede quedarse en ese estado, en esa unidad donde toda sepa

ración es abolida ¡y a la vez retornar y estar entre sus hermanos humanos! Yo creía, hasta entonces, que el amor era vinculación, una dependencia; que nos ataba los unos a los otros. ¡Pero esto va mucho más allá! Nosotros ni siquiera estamos para relacionarnos: estamos unos en el interior de los otros. Éste es el misterio. Éste es el vértigo más grande. Al final de cuentas, vengo nada más a darles esta buena noticia: al otro lado de lo peor espera el Amor. No hay, de verdad, nada a qué temer. Sí, ésta es la buena noticia que les comparto. Y además hay otra cosa todavía. Junto con esta capacidad de amar – que se agranda de manera vertiginosa – también ha crecido la capacidad de recibir el amor. Y este amor que yo he recibido, que yo he percibido de todos mis prójimos, de mis amigos, de todos los seres que, después de una veintena de años, acompaño y que me acompañan – porque ellos, de verdad, me han hecho crecer más que yo a ellos. ¡Y de pronto toda esta multitud amorosa, toda esta multitud que ustedes llevan consigo! Hace falta rendirse a la agonía, hace falta ser abatido como un árbol para liberar en torno a sí mismo tal pujanza de amor. Una ola. Una ola inmensa. Todos se han atrevido a amar. Pertenecen a esta audacia de amor. En resumen, ha hecho falta que el relámpago me sacuda para que todos alrededor mío por fin se pongan de pie y se atrevan a amar. De pie en su coraje y su belleza. Atreverse a amar con el único amor que amerita este nombre y el único amor cuya magnitud es aceptable: el amor exagerado. El amor sin medida. El amor inmoderado.

«Entonces, amigos, entiendan estas palabras que les digo como un gran llamado a estar vivos, a estar en la felicidad y a amar sin moderación. Todo es un misterio. Con la mano en el corazón, yo me inclino delante de cada uno de ustedes».

Christiane Singer «"C’est du fond de mon lit que je vous parle.«Ce dont je veux vous parler c’est tout simplement de ce que je viens de vivre. Ma dernière aventure. Deux mois d’une vertigineuse et assez déchirante descente et traversée. Avec surtout le mystère de la souffrance.

«J’ai encore beaucoup de peine à en parler de sang froid. Je veux seulement l’évoquer. Parce que c’est cette souffrance qui m’a abrasée, qui m’a rabotée jusqu’à la transparence. Calcinée jusqu’à la dernière cellule. Et c’est peut-être grâce à cela que j’ai été jetée pour finir dans l’inconcevable. Il y a eu une nuit surtout où j’ai dérivé dans un espace inconnu. Ce qui est bouleversant c’est que quand tout est détruit, quand il n’y a plus rien, mais vraiment plus rien, il n’y a pas la mort et le vide comme on le croirait, pas du tout. Je vous le jure. Quand il n’y a plus rien, il n’y a que l’Amour. Il n’y a plus que l’Amour. Tous les barrages craquent. C’est la noyade, c’est l’immersion. L’amour n’est pas un sentiment. C’est la substance même de la création. Et c’est pour en témoigner finalement que j’en sors parce qu’il faut sortir pour en parler. Comme le nageur qui émerge de l’océan et ruisselle encore de cette eau ! C’est un peu dans cet état d’amphibie que je m’adresse à vous. On ne peut pas à la fois demeurer dans cet état, dans cette unité où toute séparation est abolie et retourner pour en témoigner parmi ses frères humains. Il faut choisir. Et je crois que, tout de même, ma vocation profonde, tant que je le peux encore, ma vocation profonde est de retourner parmi mes frères humains. Je croyais jusqu’alors que l’amour était reliance, qu’il nous reliait les uns aux autres. Mais cela va beaucoup plus loin ! Nous n’avons pas même à être reliés : nous sommes à l’intérieur les uns des autres. C’est cela le mystère. C’est cela le plus grand vertige. Au fond je viens seulement vous apporter cette bonne nouvelle : de l’autre côté du pire t’attend l’Amour. Il n’y a en vérité rien à craindre. Oui c’est la bonne nouvelle que je vous apporte. Et puis il y a autre chose encore. Avec cette capacité d’aimer — qui s’est agrandie vertigineusement — a grandi la capacité d’accueillir l’amour. Et cet amour que j’ai accueilli, que j’ai recueilli de tous mes proches, de mes amis, de tous les êtres que, depuis une vingtaine d’années, j’accompagne et qui m’accompagnent — parce qu’ils m’ont certainement plus fait grandir que je ne les ai fait grandir. Et subitement toute cette foule amoureuse, toute cette foule d’êtres qui vous portent ! Il faut partir en agonie, il faut être abattu comme un arbre pour libérer autour de soi une puissance d’amour pareille. Une vague. Une vague immense. Tous ont osé aimer. Sont entrés dans cette audace d’amour. En somme il a fallu que la foudre me frappe pour que tous autour de moi enfin se mettent debout et osent aimer. Debout dans leur courage et dans leur beauté. Oser aimer du seul amour qui mérite ce nom et du seul amour dont la mesure soit acceptable : l’amour exagéré. L’amour dé- mesuré. L’amour immodéré.

«Alors, amis, entendez ces mots que je vous dis là comme un grand appel à être vivants, à être dans la joie et à aimer immodérément. Tout est mystère. La main sur le cœur, je m’incline devant chacun de vous».

Christiane Singer

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